06 novembre 2017
Le
très vivant village de pêcheur du Cape Gallo au nord-ouest de
Palerme, Sferracavallo, où nous nous installons en marge de la
capitale, nous laissera sans doute plus d'authentiques souvenirs
siciliens que la visite des sombres décrépitudes de Palerme.
Là
aussi, l'histoire a empilé plus de 20 siècles de vie humaine sans
toujours le souci de la conservation des vestiges du passé, au
contraire ! Bien sûr, je retiens entre autres, quelques traces
Normandes des X e et XI e siècles pendant lesquels le développement
sicilien est passé par ces seigneurs pauvres, souvent normands de la
Manche, et qui ont trouvé là opportunité à se redorer le blason
dans des conquêtes de hasard sur leur route de pèlerinage. En y
mélangeant les styles il en reste aujourd'hui des constructions
massives agrémentées d'inspirations byzantines.
Une
jolie route, truffée de tunnels, nous emmène plus à l'Ouest dans
l'alternance des villages, avec ou sans ramassage d'ordures. Bien que
souvent balnéaires, ceux qui n'ont pas la chance de vivre avec cette
préoccupation là, constituent d'affligeant spectacle que, même en
Afrique on ne voit plus que dans le chaos. Chacun se débarrasse sans
scrupule et comme il le peut de sa poubelle (souvent vite fait, par
la vitre de la voiture). Le long des routes, dans les tunnels, à
certains carrefours, devant les nombreuses friches abandonnées, des
m3 attendent des jours de salubrité meilleure et de conscience
collective...
Et
puis cette route côtière s'élève à l'extrémité occidentale de
l'île pour devenir le magnifique panorama d'Erice à 700 m au-dessus
de la mer. La vue y est beaucoup plus remarquable que son village
médiéval entièrement crépi, triste et sombre. Ici l'été doit
faire monter considérablement la température, ceci explique peut
être la rareté des ouvertures ?
Nous
redescendons à la tombée du jour par une sorte de Sun Set Boulevard
àTrapani qui vit depuis des siècles de l'exploitation de ses
salines.
La
plongée dans l'entassement de constructions populaires de la ville
à traverser nous effraye plutôt. A sa sortie, nous arrivons pour un
coucher de soleil in-extrémiste entre mer et marais salants,
récompensés par un bivouac de rêve face à l'archipel des Egades.
Cette
pointe ouest de l'île, la seconde de notre périple après celle du
détroit de Messine, dessine avec la troisième au Sud de Syracuse,
le triskel sicilien de la bannière régionale.
Après
50 jours de ce voyage nous mettons le cap vers l'Est. A partir de là
commence notre route du retour dans un paysage très accidenté qui
pourrait être en Afrique du Nord. L'historique Carthage est à
seulement 80 miles et outre les ruines de ses guerres puniques,
végétation, relief, culture, habitat, climat et environnement
laissé pour compte, rappellent bien la Tunisie ou le Maroc.
D'immenses
cultures céréalières d'abord, puis omniprésence de la
viticulture, (nous sommes au pays du Marsala !) et surtout d'immenses
oliveraies occupent chaque versant, chaque vallon traversés par
d'impressionnants ouvrages routiers.
Sur
la côte Sud, tant convoitée dans l'histoire, une plongée de 25
siècles dans l'Antiquité nous attend. Le premier site,
Segeste, dans un état de conservation remarquable,
ou
reconstruit comme Selinonte,
ou
encore souvent "en kit" au sol, à imaginer, comme dans la
Vallée des Temples à Agrigento.
Et
au cas où il manquerait une rondelle de colonne, nous poussons jusqu'à
la carrière voisine pour passer commande
personne
! Mais tout est prévu, le mode d'emploi est affiché...il y a même
le plan ! Y'a plus qu'à... !
25
siècles plus tard, la récession économique bloque partout beaucoup
d'autres gros chantiers, tout comme la maintenance urbaine. Mais
qu'importe ? On a le temps non... ?
Et
ici en Sicile, après tant de luttes et de conquêtes territoriales,
les techniques ont un peu évoluées, et on sait tellement bien
garder les vestiges du passé.
Toutes
ces friches industrielles, parties pour... 2490 ans ? Seront elles
là pour satisfaire les curiosités venues d'ailleurs, voir extra
planétaires ? Sauront-ils remettre dans le bon ordre ça et ça ?
D' autres curiosités, naturelles cette fois, nous ramènent sur la côte. Bien rattachée à l'histoire cependant, l'endroit porte toujours le nom de Scala dei Turchi . Ce lieu aurait servi à l'envahisseur sarrazin pour monter à l'assaut de ses nouvelles conquêtes. Aujourd'hui, en été c'est le solarium des gens du coin.
Mais
novembre s'installe. A l'intérieur du pays, il nous faut parfois un peu
d'imagination pour entrevoir les couleurs des beaux jours dans les
étendues labourées de la campagne...
Peut
être pas le meilleur moment pour se rendre au coeur géographique de
la Sicile. A 950 m d'altitude Enna ne domine pas seulement l'île, la
plus haute forteresse de Sicile domine le Temps.
Au
Duomo, le baroque du 16e et 17e charge la déco intérieure. Triple nef, colonnes
en basalte, chapiteaux sculptés, plafonds à caissons, poutre
sculptées, sols en marbre, buffet d'orgue en bois polychrome, bas reliefs...
En
faisant un tour de la ville, installée sur les promontoires rocheux
environnants, on comprend mieux sa situation stratégique tant disputée depuis des siècles. Aujourd'hui c'est une cité historique, dynamique, remarquablement propre et entretenue. A ne pas manquer!
Cette
région fût, pendant presque 150 ans, un des tous premiers sites
mondiaux producteurs de souffre. Notre visite dans une de ces
anciennes mines nous laisse dubitatifs. Si le site est très agréable,
on semble avoir mis entre parenthèses son intérêt historique et social
.
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