04/01/2015
En descendant l’Amazone
Après la rencontre de Régine
et Walter, 2 voyageurs suisses, avec qui nous échangeons pleins de tuyaux, eux
venant du Pentanal et allant vers Belém, c’est cette nuit à 4h que nous
quittons enfin l’infernale ambiance du port de Manaus.
Entre le déchargement
tumultueux d’une barge de sable (1600m3 en 2h !), les relents d’égouts, les
bruits et échappements de centaines de moteurs teuf-teuf des tapouilles du port,
et partout les inévitables sonos à donf, c’est sur la Sao Miguel, une
barge vide, que nous appareillons pour aller allonger le train poussant d’une
autre barge, vide elle aussi. Ce qui porte la longueur du convoi à plus de 150
m. Nous voyageons sans camion, sans citerne, sans conteneur et aucun fret
(seulement 4 voitures). Bizarre !
C’est encore la nuit quand
nous passons la confluence du Rio Negro et du Rio Amazonas et ne
pouvons pas photographier le partage des eaux, claires coca-cola pour l’un, très
boueuses pour l’autre, chargées de nombreux végétaux et énormes troncs d’arbre
à la dérive. Le Rio Madeira doit tenir son nom de cette quantité d’arbres
arrachés aux berges qu’il charrie.
A une vitesse de 7 à 8 neuds
nous descendons l’Amazone jusqu’au soir pour arriver au confluent du Rio
Madeira vers 17h, et commencer la remonté de ses nombreux méandres au sud-ouest !
Là, le courent devient contraire avec plus de 1,5M de m3/mn, la vitesse tombe
de moitié !
Remonté du Rio Madeira
Les berges, éloignées
parfois de plusieurs km où nous croisions jusqu’alors de nombreux cargos dans
les 2 sens, deviennent plus rapprochées avec le seul trafic de barges et autres
bateaux à passagers.
Première avarie de barre le
lendemain matin, un arbre dans le gouvernail. Accroché à une berge pendant la
réparation, nous en repartons qu’au soir.
Le rythme lent de notre
progression dans lequel nous nous installons, offre un spectacle permanent.
Celui des villages qui semblent sortir seulement de l’ importante montée des
eaux de la saison dernière, au moins 6 à 8m au-dessus du niveau actuel, avec
des morceaux d’une vie rudimentaire et très isolée que nous pouvons entrevoir
le temps de notre passage.
Celui des dauphins roses
qui remontent inlassablement le courant, celui d’une végétation époustouflante,
les vols de perroquets, les mouvements d’embarcations de tout style, du ciel
constamment changeant.
Et puis gym tous les matins
avec 30 tours de barge !
10/01/15
Voilà une semaine que nous
sommes à bord et encore à 300 km de Porto Velho à vol d’oiseau ! A se
demander si la route difficile n’aurait pas été finalement plus simple ? Ce
matin Lili me dit : ne serions-nous pas tombés sur les Pieds Nickelés de
la navigation sur l’Amazone ?
Poste d’amarrage
impeccable !
A quand le feu d’artifice aux
feux de navigation avant ?
Après un nouveau tour à la
« passerelle », je confirme.
Le timonier de quart se
démène avec une barre à roue à transmission à chaine sans démultiplication,
très dure et pleine de jeux. Le seul instrument de navigation est un sondeur
qui aide à chercher les bancs de sable.
Hormis un projecteur qui
éclaire vaguement la berge la nuit 50m
devant les barges, tout est une question de pif !... de chance… et, espérons-le
de connaissances. Mais, à la brésilienne, c’est la bonne humeur, la gentillesse
et la sympathie des gars qui font le reste, et puis sur une barge est inscrit Deus
E Fiel .
Accroché à un arbre sur une
berge pleine de moustiques pour la nième fois au petit matin, les matelots
essayent de changer sous l’eau l’hélice cassée dans la nuit. Le capitaine, lui,
sort l’arme fatale, l’objet anti-stress de toute situation, sans doute le plus
cool de la vie brésilienne : le hamac, et il se taille une bonne
sieste, pour récupérer de la nuit noire qui vient de passer. Car si le jour, la
navigation est plus qu’à l’estime, la nuit elle devient approximative,
hasardeuse et mouito peligro ! Après 3 heures d’effort, ils
remettent en route, vaincus par l’impossibilité d’arracher l’hélice endommagée
de l’arbre de transmission… Dommage cette belle toute neuve serait bien
aussi !
Nous continuons doucement
avec un pousseur qui vibre de toute part…peut être jusqu’à Humaita !
Là, les vibrations sont telles qu’il faut arrêter encore et calfater un peu les
bordées
Difficile souvent de
connaitre la raison de tous ces arrêts de 1h à une journée : Attendre du
carburant, laisser passer un grain plus violent qu’un autre qui ferme toute
visibilité, décharger une voiture en équilibre sur deux madriers, faire des
courses ou même aller chez le coiffeur…
Nous avons de plus en plus
de mal à comprendre le fonctionnement des brésiliens et à quelle type
d’économie ils s’attachent. Ils ont tout leur temps semble-t-il, nous aussi
d’ailleurs, mais nous n’engageons pas deux barges vides de 30 000 tonnes
sur un parcours fluvial à risques de plus de 1000 km, grand consommateur
d’énergie (déjà plus de 4 m3 de gas-oil brulés) particulièrement polluant et
avec 6 hommes d’équipage qui doivent bien vivre! Nous n’arrivons sans
doute pas à nous poser les bonnes questions et le langage reste LE
handicape ! Si les gringos que nous sommes ont certainement payé le prix
fort de leur passage, il y a longtemps qu’il est déjà bien englouti ! Deus
E Fiel, puisqu’on vous le dit !
Peut-être les centaines de
barges d’orpailleurs, sur lesquelles règne un semblant de vie précaire, qui
jalonnent notre périple, sont un élément de réponse : Hazard,
fatalité ? La ruée vers l’or ici ressemble plus à des travaux forcés qu'à l'aventure ? L’or,
seule activité du fleuve et encouragée par le gouvernement mais avec prohibition
sur le mercure… Et puis quelques pauvres cultures vivrières, mais la montée des
eaux rend tout ça aléatoire.
Enfin maitres de la progression du voyage!
RépondreSupprimerBelle aventure et bel article amigo
RépondreSupprimerBiz à vous deux
Vous avez bien de la chance de naviguer loin de l'ambiance terrible ici en France après les attentats et assassinats monstrueux de la semaine dernière à Charlie Hebdo et dans un hyper juif. Cabu, Wolinski et leurs amis ainsi que d'autres innocents tués par des fous islamistes c'est l'horreur !
RépondreSupprimerProfitez de vos aventures, bises.
Maintenant que vous êtes on the road again après cet interlude fluvial assez folklo, faites nous suivre vos aventures pour rêver loin de la mocheté de ce qui se passe et prend des proportions dramatiques.
RépondreSupprimerBiz jo