lundi 25 avril 2016

La Caresse

24/04/2016

Dans une ambiance un peu FarWest, Santa Rosalia semble avoir été construite autour de sa ressource première, la mine de cuivre à ciel ouvert. Rouverte en 2013 dans des conditions plus modernes, toute la ville vit sur l'exportation de la bauxite depuis le Golf de Californie.



Eglise de Gustave Eiffel pour l'expo de 1889
De là nous décidons une nouvelle traversée de la péninsule vers l'ouest et la Baie de Vizcaino. Ultime tentative à la rencontre des gros mammifères marins après lesquels nous courrons depuis 2013 sans jamais être au bon moment, au bon endroit. A priori, la côte pacifique se découvre toujours aussi peu attractive, plate et ventée, mais ici les lagunas sont pleines de trésors naturels. La salinité importante des eaux, le vent et le soleil forment les conditions optimales pour l'exploitation du sel marin. A Guerrero Negro si on ne travaille pas dans le commerce local, la pêcherie française de sardines ou le tourisme, 80% de la population vit des salines et des millions de tonnes exportées.



C'est aussi en partie à cause de cette salinité élevée que le monde animal marin est ici si présent. Les baleines grises descendent de la mer de Bering en hiver en longeant les côtes du Pacifique pour retrouver les eaux chaudes de Baja propices au bon déroulement de leur maternité jusqu'au début du printemps et elles sont Là, Encore nous dit-on ! Dans la lagune avec leurs petits ! Bien sûr il n'y en a plus 20 000 comme en février ou mars. Nous, nous espérons seulement en approcher une ou deux et de pas trop loin si possible.
Septiques, dans le brouillard de la garoua matinale, nous embarquons dans une chaloupe d'un opérateur très professionnel, Marios, et à 30 nœuds nous glissons sur les eaux calmes de la Laguna Ojo de Liebre. Au delà des hautes dunes littorales, à la Bocana, gronde la barre du déferlement océanique.






Les installations de la compagnie du sel,
les aigles pêcheurs de Californie,
puis les lions de mer...
Sympa, intéressant, mais bon...il nous amuse un peu le marinero, d'accord au moins nous ne serons pas bredouille dans nos appareils photo en regrettant nos 50 Dollars...
Le soleil monte et LA ! Sur notre tribord, un premier souffle à moins de 100 m, tout de suite accompagné d'un autre, juste à côté, une mère suitée sans doute.



Nous nous approchons pendant que le capitaine appelle son petit monde en sifflant, chantant, battant l'eau. Nous retenons notre souffle, nous commençons à y croire, et tout d'un coup elles sont là ! Deux, dix, trente... dans un périmètre de 300 m.





Nous approchons encore. A 10 m l'une d' entre elles fait surface avec son bébé face à nous, (7 m, 2 mois et demi le petit !)



Ils soufflent et plongent un peu pour venir en surface tout contre le bateau. Une volte en douceur sur le côté et son œil nous regarde à quelques centimètres. Un coup de nageoire, un léger battement de queue lui permettent le tour complet, encore et encore. Cette masse énorme, 15 m et plusieurs tonnes, se frotte délicatement à la coque qui ne fait pas la moitié de leur longueur.





Des mains se tendent vers la tête qui sort de l'eau, s'approche contre le bordage. Vient à notre rencontre...Ça y est ! Le contact est établi !






Exceptionnelle ! Douce caresse inoubliable ! Et nous allons pouvoir la renouveler pendant plus d'une heure avec beaucoup de ces animaux gigantesques qui semblent, avec tant de douceur et de délicatesse, chercher le contact de l'homme dans leur bruyante expiration... Un soupir de bonheur pour nous. Une relation exceptionnelle qui nous émeut beaucoup puisque aucune attente ne la motive. Quel autre animal, surtout de cette taille, est capable d'un tel comportement désintéressé ? Jusque là nous y croyions peu ou au mieux nous étions dubitatifs devant les habituels clichés du contact tactile avec la baleine, mais je vous assure, quand on a eu le bonheur de passer sa main une fois sur la peau de son énorme museau, n'est ce pas un peu de notre relation au Monde qui se modifie ?
         Mon fils, te souviens-tu d'une rencontre du même type en nageant avec les                  dauphins de Fernando de Norhonia à notre atterrissage sur le Brésil à bord de               Cythère il y a 37 ans ?
Pour terminer cette journée nous reprenons la route vers l'est en traversant le Sud du Désert de Vizcaino. La piste, très tôlée au début, devient un ruban sablonneux étroit donnant l'impression de rouler sur du velours. Quelques beaux bacs à sable au fond des rios mais sans avoir jamais à y jardiner.




Autour de nous défile un véritable jardin botanique dont nous détaillons ces espèces nouvelles pour nous à chaque arrêt. Depuis notre arrivée en Baja, nous cherchons le fameux boojum tree ou  « navet à l'envers ». Lili nous ayant mis sur le coup à la recherche de ce spécimen particulier, endémique de la région, c'est ici qu'il semble se plaire, le voici !. 






A l'approche de la Sierra de San Borja, la piste se fait plus pierreuse jusqu'au bivouac de Francisquito en retrouvant les eaux calmes du Golf pour une soirée romantique.



A la baie de Los Angeles, on nous parle d'une Mission cachée dans la Sierra, très isolée et difficile d'accès. Nous refaisons les pleins avant de repartir à l’assaut de la pierraille et dans la lumière du petit soir San Borja se dévoile devant nous aux confins de 3 vallées arides.




Ici vit une famille sur une exploitation agricole de 13 000 hec (de pierres) qui nous accueille pour la visite en nous invitant à passer la nuit au rancho. Jésuite à sa fondation au XVIIIe avec des constructions en adobe partiellement conservées,


elle devient rapidement Franciscaine, puis Dominicaine sous sa forme architecturale actuelle.


Abandonnée et oubliée dans le désert, elle fait l'objet aujourd'hui d'un programme archéologique de restauration mené depuis 20 ans, avec plus ou moins de bonheur, par le gouvernement et la famille.

Pour franchir une dernière fois la Sierra vers le Golf de Californie, nous faisons une grande boucle de piste dans le désert. Très végétal au début avec quelques fleurs de l'éclosion printanière, il devient vite exclusivement minéral à l'approche de la mer de Cortès que nous retrouvons une dernière fois au pied du volcan Prieto, au Sud de San Felipe. Là notre pêcheur aura moins de chance en y laissant ses rapalats.

dimanche 17 avril 2016

Entre deux mers

16/04/2016


Jusqu'à San José, puis sa grande sœur de Cabo San Lucas, nous nous régalons sur les pistes côtières de la mer de Cortès.







Nous les retrouvons, plus sauvages encore, en remontant côté Pacifique dès que nous parvenons à nous extirper de la zone sud du Cabo mythique de la région


gangrénée par la promotion immobilière, les escales croisiéristes, les excursions des opérateurs et l'extension urbaine de la station américaine à la mode. Loin encore ça pue la spéculation immobilière et l'opportunisme des futures affaires foncières qui s'impatientent. Tout comme au Costa Rica, tout est à vendre ici. A hauteur du tropique du Cancer, nous abandonnons vite l'autopista du côté de Todos Santos et avant de retrouver le campo désertique avec sable et cactus géants,

petit tour dans cette cité calme remise à neuf dans son jus de l'industrie sucrière du 18e siècle qui marqua sa prospérité. Bourgade particulièrement soignée pour le plus grand plaisir des touristes, elle vit aujourd'hui de ses galeries et marchés artisanaux.


Nous vivons notre dose de sauvagerie quotidienne avec une préférence pour les abords de la mer de Cortès car il faut souvent fuir le vent du Pacifique que rien n'arrête sur ses côtes plates et peu hospitalières.
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Une dizaine de degrés plus au Nord, vers Tijuana, avant San Diego, ça en sera fini. Conscients que la Baja nous offre nos derniers moments de nomadisme en complète autonomie sur le continent américain, nous nous éclatons vraiment en parcourant des km de piste désertique dans cette magnifique région.







Retour sur les rivages de la mer de Cortès





le cuivre dont le minerai traité est directement chargé, l'élevage de crevettes et la pêche artisanale semblent faire toute l'économie locale.








Dans la Sierra, entre les 2 mers, le paysage est souvent digne des grandes images nature de la Patagonie du Sud Chili.




Dans cet univers minéral, où des années peuvent passer sans donner la moindre pluie, il n'est pas rare de trouver au fond d'un talweg, la verte exubérance d'un oasis et la fraîcheur d'un improbable cours d'eau.




Presque dans l'atmosphère d'une guelta saharienne, nous y installons le bivouac en harmonie avec les bêtes d'un petit rancho voisin qui viennent s'abreuver et partager l'ombre du tamarinier.



Peu avant San Javier, au matin d'un autre bivouac, c'est avec beaucoup de gentillesse et de douceur qu'Ignacio Moguillo nous fait découvrir tous les secrets de son paradis à lui. Voyageur de passage, perdez votre temps ! Et allez lui rendre visite pour un moment de bonheur en sa compagnie dans la lumière du matin californien (N25°35.335 W111°38.519)



San Luis Gonzaga, livre aujourd'hui l'image digne d'un épisode de la célèbre série avec un Z... comme Z..., elle est comme San Javier une des premières missions Jésuites fondée au XVIIe. Loreto en est la mission mère de Californie 70 ans avant que la couronne d'Espagne s'inquiète de ces entrepreneurs du nouveau monde et les expulse pour les remplacer par l'ordre Franciscain.










Mario et sa femme ont mis 10 jours pour venir de Quebec

Quelques poissons plus loin, quelques km de piste fabuleuse encore... la péninsule n'en finit pas de nous livrer ses merveilles.








Il y a un peu plus de 5 mois, à la suite du triste Belize, nous rentrions au Mexique. Que nous aurons peine à quitter le pays, sa terre et ses habitants !